Les détenus étaient fréquemment blessés
du fait des conditions de travail qu’on leur impose ou des coups qu’on leur
inflige pour n’importe quel motif.
Ils peuvent tomber malades à cause des
conditions de vies désastreuses du camp :
la sous-alimentation, la rareté
de l’eau, le manque général d’hygiène, la dureté du climat et l’entassement des
détenus affaiblissent les organismes et favorisent malheureusement la
propagation de la dysenterie, du typhus ou de la tuberculose.
Dans un premier temps, l’état de
santé des détenus n’est pas une priorité pour les SS.
Les déportés qui tombent
malades et viennent à mourir ne sont plus une charge pour l’administration SS.
Le risque épidémique les préoccupe beaucoup plus : d’une part, toute
épidémie doit être signalée à l’administration centrale et suppose l’arrêt des
permissions pour les SS ; d’autres part, l'épidémie peut se répandre
rapidement et contaminer les SS eux-mêmes.
Dans un second temps, l’état de
santé des déportés devient plus important parce qu’ils sont utilisés comme
force de travail et qu’ils doivent être un minimum performants, même si les
détenus morts peuvent être remplacés par les nouveaux arrivants.
Chaque camp dispose donc d’un Revier,
une infirmerie, où sont affectés des détenus ayant théoriquement des
compétences médicales, sous la direction de médecins SS.
Un Block ou un secteur
de quarantaine peut être aménagé pour isoler provisoirement les détenus
contagieux et ceux transférés d’un autre camp.
Les déportés sont rasés
intégralement à leur arrivée, lavés et badigeonnés d’antiseptique, au prétexte
de la lutte contre les parasites.
Des opérations de désinfection des corps, des
vêtements et des bâtiments sont organisées plus ou moins régulièrement dans les
camps en vertu de règles d’hygiène sans cesse rappelées.
Ces dispositions sont pourtant d’une très faible efficacité.
Les détenus malades ou blessés sont le plus souvent livrés à eux-mêmes.
Les
isolés s’affaiblissent et s’effondrent très vite.
Le langage concentrationnaire
désigne par le terme de « musulmans » ces détenus à bout de force, à
peine capable de tenir debout, rejetés par tous.
Pour éviter d’en arriver à ce
point de non-retour, les déportés font une traque incessante aux parasites, en
particulier les poux vecteurs du typhus, évitent de boire une eau trop
suspecte, tente de rester le moins sale possible alors que la crasse et la
vermine sont omniprésentes.
Les détenus
qui le peuvent se soutiennent les uns les autres.
La solidarité alimentaire et
une première étape de la survie, indispensable.
Viennent ensuite les remèdes de
fortune conseillés par les déportés qui ont des connaissances médicales :
par exemple, le charbon de bois est recommandé pour limiter la diarrhée, mais
avoir une place plus proche des latrines peut aussi être salvateur ;
la
bave d’escargot quand on en trouve, peut également soulager les maux de gorge
provoqués par la toux ;
l’urine peut servir à nettoyer des plaies, à
défaut d’eau stérile ; etc.
Parfois des interventions clandestines se
déroulent au fond des baraques afin de lutter contre certaines infections
pouvant entraîner la mort en cas d’absence de traitement.
Des médecins ou des
chirurgiens détenus parviennent, avec du matériel de récupération détourné et
sans anesthésie (l’opéré est tenu par ses camarades), à inciser des plaies
purulentes ou à percer des abcès dentaires.
Quand leur état est devenu trop
préoccupant, les détenus se résolvent à aller au Revier, qui a la réputation d’être
un mouroir.
Les chances d’en sortir vivant sont relativement faibles.
En effet,
le matériel médical est souvent très sommaire, les médicaments et le linge sont
en quantité très insuffisante, tout comme les rations alimentaires qui sont réduites
pour les malades puisqu’ils ne travaillent plus.
En outre, les admis au Revier
sont privés de leurs vêtements, partis à la désinfection et ne disposent que de
simple couverture dans des locaux rarement chauffés.
Ils doivent s’entasser à plusieurs dans les châlits, ce qui favorise
la transmission des virus et des bacilles pathogènes.
Enfin, les médecins SS se
préoccupent surtout de renvoyer les détenus au travail et procèdent régulièrement
à des sélections qui se terminent pour les plus faibles par une injection
mortelle ou par l’asphyxie dans une chambre à gaz (à Auschwitz, mais aussi à
Ravensbrück ou à Mauthausen).
Voici le témoignage d'ELIE BUZYN, rencontré à l'Hotel de Ville de Paris, lors d'une conférence-goûter organisée par l'association Ciné-Histoire :
AIDE D’UN ALLEMAND A L’INFIRMERIE
On m’a sauvé la vie, c’était un témoin de Jéhovah.
Après la sélection, mes parents ont été envoyés à la mort. Moi, j’ai été sélectionné pour travailler, tatoué, et envoyé à Auschwitz I dans un Kommando.
Je suis tombé malade, mais c’était surtout psychologique : j’ai eu des diarrhées, des vomissements, la dysenterie.
Comme c’était contagieux, j’ai été envoyé au Revier (l’infirmerie), dans l’endroit réservé aux contagieux, là où le médecin nazi ne mettait jamais les pieds. Dans un autre block il y avait des expérimentations.
Je savais que j’étais condamné à mort.
Je vois approcher un type en blouse blanche, blanc aux yeux bleus.
J’étais sûr que c’était le médecin nazi et qu’il allait m’envoyer à la mort. J’étais mal.
J’entends « Calme-toi ! » en allemand.
Je cherchais son insigne, sa croix gammée, une tête de mort, mais je ne vois qu’un numéro avec un triangle violet : ce n’était pas un nazi !
« Tu es malade, mais je ferai tout ce qu’on peut faire pour te soulager ».
Ce monsieur-là, dont je ne connaissais pas l’existence, est venu me voir tous les quart d’heures avec une boisson sucrée et il me la donnait à la cuillère tellement j’étais affaibli.
Au bout de 3 ou 4 jours, je me sentais mieux. Ma fièvre est tombée et je lui dois la survie.
Quand je suis rentré, les gens étaient étonnés que je sois revenu. Je leur ai raconté.
Ce triangle violet était un Allemand témoin de Jéhovah et objecteur de conscience qui refusait de faire l’armée et était anti nazi.
Il y a toujours eu un petit espoir, et là c’était le cas.
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Témoignage de Jean-Louis STEINBERG
Il s'est fait soigner au Revier, car il avait une oreille infectée. Il a été soigné car il se trouvait dans un kommando de travail, dans un camp de déportés politiques. Il a reçu l'aide d'un médecin français, ancien résistant.
Il a été ensuite opéré d'une mastoïdite.